La Cour Constitutionnelle de la République du Kosovo a statué sur les requêtes conjointes dans les affaires (i) KO232/23, avec les requérants : Abelard Tahiri et dix (10) autres députés; et (ii) KO 233/23, avec les requérants : Besian Mustafa et dix (10) autres députés de l’Assemblée de la République du Kosovo, soumises à la Cour en vertu des autorisations définies au paragraphe 5 de l’article 113 [Juridiction et Parties autorisées] de la Constitution de la République du Kosovo, concernant l’appréciation de la constitutionnalité de la Loi no. 08/L-180 portant modification et complément à la Loi n° 06/L-048 sur le Conseil de Surveillance Indépendant de la Fonction Publique du Kosovo.
La Cour a décidé (i) de déclarer la requête recevable à l’unanimité ; et de constater (ii) à l’unanimité, que les articles 2, 7 et 8 de la Loi contestée ne sont pas conformes au paragraphe 1 de l’article 24 [Égalité devant la loi] et à l’article 32 [Droit à un recours judiciaire] en relation avec le paragraphe 2 de l’article 101 [ Fonction Publique] de la Constitution et de déclarer ceux-ci invalides ; (iii) avec sept (7) voix pour et deux (2) voix contre que l’article 6 de la Loi contestée n’est pas conforme au paragraphe 2 de l’article 101 [Fonction publique] de la Constitution et de déclarer celui-ci invalide ; (iv) à l’unanimité, que les articles 9, 10 et 11 de la Loi contestée ne sont pas conformes au paragraphe 1 de l’article 31 [Droit à un procès équitable et impartial] de la Constitution et de déclarer ceux-ci invalides ; et (v) à l’unanimité en vertu de l’article 43 (Délais) de la Loi nr.03/L-121 sur la Cour Constitutionnelle de la République du Kosovo de déclarer que la Loi no. 08/L-180 portant modification et complément à la Loi no. 06/L-048 sur le Conseil de Surveillance Indépendant de la fonction publique du Kosovo soit transmise à la Présidente de la République du Kosovo pour décret conformément aux modalités définies dans l’Arrêt de la Cour et sans les articles 2, 6, 7 , 8, 9, 10 et 11 de la Loi contestée.
L’Arrêt précise tout d’abord que la Loi contestée modifie et complète la Loi no. 06/L-048 sur le Conseil de Surveillance Indépendant de la Fonction publique du Kosovo, dans quatre (4) aspects principaux. Premièrement, elle modifie la composition du Conseil de Surveillance Indépendant de sept (7) à quinze (15) membres, en modifiant et/ou en complétant également les aspects liés aux critères et à la procédure de nomination des membres du Conseil de Surveillance Indépendant. Deuxièmement, elle supprime la disposition légale actuelle qui garantit l’immunité des membres du Conseil de Surveillance Indépendant dans leur prise de décision. Troisièmement, elle prive le Conseil de Surveillance Indépendant du pouvoir de statuer sur les recours des fonctionnaires et/ou des candidats à des postes de cadre supérieur contre les décisions du Gouvernement, respectivement elle empêche ceux-ci de déposer plainte auprès du Conseil de Surveillance Indépendant contre les décisions du Gouvernement, mais en leur garantissant le droit de recours devant le tribunal compétent en cas de conflit administratif. Et quatrièmement, contrairement à la loi en vigueur sur le Conseil de Surveillance Indépendant, le caractère exécutoire des décisions du Conseil de Surveillance Indépendant est conditionné soit à l’absence de plainte auprès de la juridiction compétente soit en cas de plainte, au prononcé d’une décision judiciaire définitive par la juridiction compétente.
Les députés requérants contestent la Loi susmentionnée, tant au niveau de la procédure suivie pour son approbation qu’au niveau de son contenu. Selon les précisions apportées dans l’Arrêt, (i) dans le premier cas, les requérants soutiennent, en substance, que la procédure suivie pour l’adoption de la Loi contestée est contraire à l’article 77 (Examen du projet de loi pour modification et complément de la loi) du Règlement de Procédure de l’Assemblée ; tandis que (ii) dans le deuxième cas, en substance, ils affirment que la Loi contestée est contraire aux articles 24 [Égalité devant la loi], 31 [Droit à un procès équitable et impartial], 32 [Droit à un recours juridique] , 53 [Interprétation des dispositions relatives aux Droits de l’Homme], 55 [Limitation des Droits et Libertés fondamentaux], 101 [Fonction publique] et 142 [Agences indépendantes] de la Constitution, entre autres et essentiellement, parce qu’ elle (i) porte atteinte aux droits et libertés fondamentaux des hauts fonctionnaires en leur empêchant, contrairement aux autres fonctionnaires, de porter plainte auprès du Conseil de Surveillance Indépendant, et en leur refusant ainsi le droit à un recours juridique, en enlevant par la même occasion au Conseil de Surveillance Indépendant des pouvoirs constitutionnels qui assurent le respect des règles et principes régissant la fonction publique conformément aux dispositions de l’article 101 [Fonction publique] de la Constitution ; (ii) porte atteinte à l’indépendance décisionnelle des membres du Conseil de Surveillance Indépendant, en éliminant les garanties d’immunité dans la prise de décision, contrairement à l’article 101 [Fonction publique] de la Constitution ; et (iii) porte atteinte aux pouvoirs constitutionnels du Conseil de Surveillance Indépendant, y compris aux droits des parties à un procès équitable et impartial, étant donné que l’effet “de la force exécutoire” des décisions du Conseil de Surveillance Indépendant est exclu jusqu’à décision définitive des tribunaux ordinaires.
Les allégations des requérants sont sur le principe soutenues par l’ Avocat du Peuple et le Conseil de Surveillance Indépendant, tandis qu’elles sont contre-argumentées par le Premier Ministre de la République du Kosovo et le groupe parlementaire du mouvement VETËVENDOSJE!. Ces derniers affirment que la Loi contestée est conforme à la Constitution, en substance, parce que (i) le Conseil de Surveillance Indépendant n’est pas une Agence Indépendante de l’Assemblée, et que les pouvoirs du Conseil de Surveillance Indépendant découlent de l’Assemblée; (ii) le Conseil de Surveillance Indépendant ne peut pas limiter les pouvoirs du Gouvernement de la République du Kosovo et le caractère décisionnel de celui-ci ne peut être limité en aucune circonstance par un“organe quasi judiciaire”; (iii) il faut faire la distinction entre les catégories de la fonction publique à proportion de leur responsabilité, de leurs pouvoirs et de leur rôle général dans le fonctionnement de l’administration, tandis que le Conseil de Surveillance Indépendant ne peut se rajouter à la prise de décision du Gouvernement en ce qui concerne les fonctionnaires et/ou les candidats à des postes de fonctionnaires occupant des postes de haute direction et dont le droit à un recours juridique n’est pas violé, car le droit de recours devant les tribunaux ordinaires en cas de conflit administratif leur est garanti ; (iv) il relève des pouvoirs de l’Assemblée d’ estimer ou non la nécessité de garantir l’immunité liée à la prise de décision du Conseil de Surveillance indépendant ; et (v) les décisions du Conseil de Surveillance Indépendant ne peuvent devenir “exécutables” qu’après décision des tribunaux ordinaires car les décisions du Conseil ne peuvent se rajouter celles du Gouvernement.
Dans l’appréciation de la constitutionnalité de la Loi contestée, la Cour a tout d’abord et entre autres élaboré (i) les principes constitutionnels fondamentaux concernant le Conseil de Surveillance Indépendant et ses relations avec le pouvoir exécutif, tels que spécifiés au chapitre VI [Gouvernement de la République du Kosovo] de la Constitution ; (ii) les principes constitutionnels fondamentaux liés à l’égalité devant la loi et au droit à un recours juridique effectif ; et (iii) les principes établis par la Cour, à travers sa pratique judiciaire déjà consolidée relative à la fonction et aux pouvoirs du Conseil de Surveillance Indépendant qui découlent de l’article 101 [Fonction publique] de la Constitution, y compris l’indépendance décisionnelle de ses membres, en mettant l’accent, mais sans s’y limiter, sur les Arrêts de la Cour dans les affaires (a)KO171/18 concernant l’appréciation de la constitutionnalité de la Loi no. 06/L-048 sur le Conseil de Surveillance Indépendant de la Fonction publique du Kosovo ; (b)KO127/21 concernant l’ appréciation de la constitutionnalité de la Décision [no. 08-V-29] de l’Assemblée de la République du Kosovo du 30 juin 2021 portant révocation de cinq (5) membres du Conseil de Surveillance Indépendant ; et (c) KO216/22 et KO220/22 concernant l’appréciation de la constitutionnalité de la Loi no. 08/L-197 sur les Agents publics.
En appliquant les principes susmentionnés pour apprécier la constitutionnalité de la Loi contestée, l’Arrêt souligne d’abord que (i) l’article 101 [Fonction publique] de la Constitution établit un Conseil de Surveillance Indépendant de la Fonction publique doté de pouvoir constitutionnel pour assurer le respect des règles et des principes qui régissent la fonction publique dans la République du Kosovo ; (ii) la pratique judiciaire de la Cour, au fil des années, a clarifié la différence entre le Conseil de Surveillance Indépendant et les Agences indépendantes établies en vertu de l’article 142 [Agences indépendantes] de la Constitution, stipulant, en principe, que alors que la création, y compris la fonction et les pouvoirs des Agences indépendantes, relèvent des pouvoirs de l’Assemblée, le Conseil de Surveillance Indépendant est un organe établi par la Constitution et ses pouvoirs constitutionnels ne peuvent être violés par les lois de l’Assemblée ; et (iii) même si l’Assemblée a plein pouvoir pour préciser par des lois le rôle du Conseil dans l’exercice de sa fonction visant à assurer le respect des règles et principes régissant la fonction publique, celle-ci doit respecter l’indépendance et les pouvoirs du Conseil conformément aux dispositions constitutionnelles.
Dans l’Arrêt de la Cour, les principes expliqués ci-dessus ont été appliqués lors de l’examen de chacun des articles évalué de la Loi contestée séparément. Cela dit et pour les besoins de ce résumé, à la suite vont être clarifiées les constatations et les principales conclusions concernant les questions les plus controversées de la Loi contestée, à savoir (i) l’exemption du caractère décisionnel du Conseil de Surveillance Indépendant relatif aux décisions du Gouvernement concernant les candidats et les fonctionnaires occupant des hauts postes de direction, ainsi que le fait que ces derniers ne puissent adresser leurs plaintes au Conseil de Surveillance Indépendant ; (ii) la suppression de l’immunité du caractère décisionnel des membres du Conseil de Surveillance Indépendant ; et (iii) exclusion du “caractère exécutoire” de toutes les décisions du Conseil de Surveillance Indépendant jusqu’à la délivrance d’une décision finale des tribunaux ordinaires
(i) exemption du caractère décisionnel du Conseil de Surveillance Indépendant en relatif aux décisions du gouvernement concernant les candidats et les fonctionnaires occupant des hauts postes de direction
L’Arrêt stipule d’abord qu’à travers les articles 2, 7 et 8 de la Loi contestée, sont modifiés et complétés les articles 6 (Fonctions du Conseil), 16 (Examen des plaintes) et 19 (Procédure de surveillance de la sélection des fonctionnaires occupant des hauts postes de direction et des cadres) de la Loi fondamentale, abrogeant le pouvoir du Conseil de Surveillance Indépendant (i) d’ examen des plaintes contre les décisions du gouvernement sur la sélection des fonctionnaires occupant des hauts postes de direction ; ainsi que (ii) de surveillance de la procédure de sélection des hauts fonctionnaires. Selon les précisions apportées dans l’Arrêt, les articles susmentionnés soulèvent deux (2) questions constitutionnelles, à savoir (i) le pouvoir constitutionnel du Conseil de Surveillance Indépendant pour assurer le respect des règles et principes qui régissent la fonction publique de la République du Kosovo ; et (ii) l’égalité devant la loi en ce qui concerne le droit à un recours juridique relatif aux candidats et aux fonctionnaires occupant des postes de direction par rapport aux autres catégories de la fonction publique.
Dans le premier cas, l’Arrêt met l’accent sur la pratique judiciaire consolidée de la Cour, notamment dans (i) son Arrêt dans l’affaire KO171/18 dans lequel a été élaboré le pouvoir du Conseil Indépendant de Surveillance pour assurer le respect des règles de la fonction publique concernant toutes les catégories de fonctionnaires, sans exception ; et (ii) son Arrêt dans les affaires KO216/22 et KO220/22, par le biais duquel la constitutionnalité de la Loi sur les Agents publics a été évaluée et qui, dans la qualification de la fonction publique, incluait également les fonctionnaires, à savoir les hauts fonctionnaires et, en outre, en détaillant le droit de recours au Conseil de Surveillance Indépendant, ne faisait pas de distinction entre les catégories de fonctionnaires, donnant à tous le droit de déposer une plainte auprès du Conseil de Surveillance Indépendant pour toute action ou inaction des autorités qui viole les droits ou les intérêts juridiques découlant de la relation de travail dans la fonction publique. Selon les précisions apportées dans l’Arrêt, la Constitution définit au Conseil de Surveillance Indépendant le pouvoir d’ assurer le respect des règles et principes qui régissent la fonction publique, pouvoir qui s’applique à toutes les catégories qui, en vertu des lois applicables, relèvent de la portée de la fonction publique. En outre, le Conseil de Surveillance Indépendant est une institution établie dans le chapitre constitutionnel du Gouvernement de la République du Kosovo, et la Loi contestée exclut le pouvoir de caractère décisionnel du Conseil de Surveillance Indépendant précisément uniquement en ce qui concerne les décisions du Gouvernement.
De plus dans le deuxième cas, l’Arrêt, en appliquant les principes issus de la pratique judiciaire de cette Cour, ainsi que celle de la Cour Européenne des Droits de l’Homme en matière d’égalité devant la loi et de droit à un recours juridique précise, entre autres, que, en vertu des lois applicables, les candidats au poste de et les fonctionnaires de la catégorie des cadres supérieurs entrent dans la définition de la fonction publique et, à ce titre, occupent des postes “relativement similaires et/ou analogues” à ceux des autres catégories de la fonction publique. Par conséquent, les différences définies dans la Loi contestée dans le contexte d’égalité d’accès aux voies de recours, à savoir l’accès à l’appréciation et aux décisions du Conseil de Surveillance Indépendant, aboutissent à une “différence de traitement ”, et qui, pour autant qu’elle soit “définie par la loi” et puisse poursuivre un “but légitime”, n’ est pas proportionnée au but poursuivi, notamment parce que malgré le pouvoir constitutionnel du Conseil de Surveillance Indépendant pour veiller au respect des règles de la fonction publique, et contrairement à toutes les autres lois applicables, y compris la Loi sur les agents publics, exclut uniquement la catégorie susmentionnée du contrôle du Conseil de Surveillance Indépendant et cela uniquement en rapport aux décisions du Gouvernement de la République du Kosovo.
En conséquence, et selon les précisions données dans l’Arrêt, la Cour a constaté que les articles 2, 7 et 8 de la Loi contestée ne sont pas conformes au paragraphe 1 de l’article 24 [Égalité devant la loi] et à l’article 32 [Droit à un recours juridique] en relation avec le paragraphe 2 de l’article 101 [Fonction publique] de la Constitution.
(ii) suppression de l’immunité de prise de décision des membres du Conseil de Surveillance Indépendant
L’Arrêt précise tout d’abord que l’article 6 de la Loi contestée supprime dans son intégralité le paragraphe 3 de l’article 11 (Mandat des membres du Conseil) de la Loi fondamentale et qui définit que le Président et les membres du Conseil de Surveillance Indépendant concernant le caractère décisionnel dans le cadre des fonctions constitutionnelles et juridiques du Conseil, jouissent de l’immunité contre les poursuites pénales, les poursuites civiles et la destitution.
Dans le contexte susmentionné, l’Arrêt souligne le fait que l’indépendance décisionnelle des membres du Conseil de Surveillance Indépendant a été spécifiquement examinée dans deux Arrêts de la Cour, dans les affaires KO171/18 et KO127/21, respectivement. Par (i) le premier Arrêt, la Cour a évalué précisément la constitutionnalité du paragraphe 3 de l’article 11 (Mandat des membres du Conseil) de la Loi fondamentale, qui est abrogé par la Loi contestée, en le qualifiant conforme à l’article 101 (Fonction Publique) de la Constitution, tandis que (ii) par le deuxième Arrêt, la Cour a déclaré contraire à la Constitution la révocation des membres du Conseil de Surveillance Indépendant en raison de leur prise de décision dans des cas concrets. À travers deux Arrêts, la Cour a, entre autres, souligné que (i) l’indépendance constitutionnelle du Conseil de Surveillance Indépendant est conditionnée par l’indépendance décisionnelle de ses membres ; (ii) l’indépendance constitutionnelle du Conseil de Surveillance Indépendant dans l’exercice des fonctions définies par la Constitution et la loi, attribue aux membres du Conseil de Surveillance indépendant l’immunité en matière de prise de décision dans le cadre des fonctions constitutionnelles et juridiques du Conseil de Surveillance Indépendant, de toute poursuite pénale, de poursuite civile ou révocation, ce qui leur permet d’exercer librement leurs fonctions de manière indépendante et sans crainte de conséquences sur l’exercice de leurs fonctions en relation avec “les opinions exprimées, la manière de voter ou les décisions prises dans le cadre de leur travail”; (iii) bien que l’Assemblée ait le pouvoir constitutionnel de superviser le Conseil de Surveillance indépendant conformément aux dispositions spécifiées dans la loi approuvée par l’Assemblée elle-même, y compris la possibilité de révoquer ses membres dans les circonstances spécifiées dans la loi applicable au Conseil de Surveillance Indépendant, ses membres ne peuvent être révoqués pour prise de décision. Selon les précisions fournies dans l’Arrêt, une telle possibilité, sur la base de laquelle les membres du Conseil de Surveillance Indépendant pourraient être révoqués pour leur prise de décision, porterait gravement atteinte à l’indépendance fonctionnelle du Conseil de Surveillance indépendant et au but même de son existence, en vertu des dispositions de l’article 101 [Fonction publique] de la Constitution et des lois applicables. Par ailleurs, l’Arrêt réitère le fait que la légalité des décisions du Conseil de Surveillance Indépendant est soumise au contrôle du pouvoir judiciaire et non du pouvoir législatif et/ou exécutif.
Par conséquent, et selon les précisions apportées dans l’Arrêt, la Cour a statué que l’article 6 de la Loi contestée n’est pas conforme au paragraphe 2 de l’article 101 [Fonction publique] de la Constitution.
(iii) exclusion du “caractère exécutoire” des décisions du Conseil indépendant jusqu’à la délivrance d’une décision définitive des tribunaux ordinaires
L’Arrêt précise d’abord qu’à travers les articles 9, 10 et 11 de la Loi contestée, les articles 21 (Décision du Conseil), 22 (Déclenchement d’un conflit administratif) et 23 (Procédure en cas de non-exécution de la décision du Conseil) de la Loi fondamentale sont modifiés et complétés en déterminant que les décisions du Conseil de Surveillance Indépendant n’ont pas le statut de “caractère exécutoire”, à savoir qu’elles ne deviennent “exécutables” (i) qu’après l’expiration des délais de recours devant les tribunaux ordinaires; ou (ii) en cas de recours, seulement après que la décision des tribunaux ordinaires soit devenue définitive.
Dans le contexte susmentionné, l’Arrêt développe la pratique judiciaire consolidée de la Cour, y compris dans le contexte de requêtes individuelles et qui ont soulevé, en substance, l’importance du “caractère exécutoire” des décisions du Conseil de Surveillance Indépendant, y compris dans le contexte des garanties constitutionnelles pour un procès équitable et impartial et l’efficacité du recours judiciaire. S’appuyant sur cette pratique judiciaire, la Cour a précisé de manière constante et continuelle que les décisions du Conseil de Surveillance Indépendant, qui présente les qualités d’un “quasi-tribunal” dans le cadre des obligations découlant de l’article 31 [Droit à un procès équitable et impartial ] de la Constitution en relation avec l’article 6 (Droit à un procès équitable) de la Convention européenne des droits de l’homme, sont des décisions “définitives, contraignantes et exécutoires ” en procédure administrative. L’Arrêt rappelle en outre que le Conseil de Surveillance indépendant a plein pouvoir pour trancher les questions liées au respect des règles de la fonction publique, tandis que l’appréciation de la légalité de ces décisions est soumise aux tribunaux ordinaires lesquels, en vertu du droit applicable aux conflits administratifs, ont plein pouvoir pour suspendre l’exécution des décisions du Conseil de Surveillance Indépendant en imposant des mesures provisoires, lorsque, sur la base de l’appréciation des tribunaux compétents, les critères définis par la loi sont remplis. Selon les précisions apportées, priver toutes les décisions du Conseil de Surveillance indépendant de leur “caractère exécutoire”, dans la mesure où les tribunaux eux-mêmes n’ont pas empêché leur exécution conformément aux dispositions des lois applicables, porte atteinte à l’effectivité du pouvoir constitutionnel du Conseil de Surveillance indépendant pour garantir le respect des règles et principes qui régissent la fonction publique de la République du Kosovo selon les dispositions de l’article 101 (Fonction Publique) de la Constitution.
En conséquence, et selon les précisions données dans l’Arrêt, la Cour a conclu que les articles 9, 10 et 11 de la Loi contestée ne sont pas conformes au paragraphe 1 de l’article 31 [Droit à un procès équitable et impartial] de la Constitution.
Enfin, l’Arrêt précise que, sur la base des allégations des requérants, il résulte que (i) la procédure suivie pour l’adoption de la Loi contestée n’a pas été considérée comme étant contraire à la Constitution ; et (ii) les articles 3, 4 et 5 de la Loi contestée qui modifient et complètent les articles 8 (Composition du Conseil), 9 (Critères de nomination des membres du Conseil) et 10 (Procédure de nomination des membres du Conseil) de la Loi fondamentale ne sont pas considérés comme étant contraires à la Constitution.
L’Arrêt précise également que les requêtes ont été soumises à la Cour en vertu du paragraphe 5 de l’article 113 [Juridiction et parties autorisées] de la Constitution et que cette catégorie de requêtes a un caractère suspensif, à savoir une telle loi peut être transmise à la Présidente de la République du Kosovo pour promulgation seulement après décision de la Cour et conformément aux modalités définies dans la décision finale de la Cour. Dans le cadre de sa pratique judiciaire, telle qu’ exposé dans l’Arrêt, considérant que l’autre partie de la Loi contestée peut être mise en œuvre sans les dispositions déclarées contraires à la Constitution, la Cour a décidé que la Loi n° 08/L-180 portant modification et complément à la loi n° 06/L-048 sur le Conseil de Surveillance Indépendant de la Fonction Publique du Kosovo, soit transmise à la Présidente pour promulgation, sans les articles 2, 6, 7, 8, 9, 10 et 11 et qui ont été évalués contraires à la Constitution et, en tant que tels, ont été déclarés invalides.
Cette traduction n’est pas officielle et ne peut servir qu’ à des fins d’information.
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